Qu’est ce que l’ethnographie ?

L’ethnographie est une méthode d’enquête en sciences sociales qui amène les chercheurs à avoir partie liée avec les activités, les discussions et les relations se déployant dans l’univers social, professionnel ou culturel sur lequel porte leur analyse. Ainsi, les ethnographes se caractérisent par le fait qu’ils partagent, autant que faire se peut, les activités quotidiennes des personnes qui peuplent les institutions, les lieux ou les organisations qui constituent leur(s) terrain(s) d’enquête. Contrairement à d’autres méthodes d’enquêtes qui saisissent le monde social à travers les déclarations des enquêté.es (enquête par questionnaire ou entretiens qualitatifs), l’ethnographie valorise ainsi l’observation directe, faisant ainsi le pari que l’implication du chercheur au plus près des enquêté.es et des milieux étudiés favorise la production de données denses, riches et sensibles, susceptibles d’autoriser des analyses nuancées des phénomènes étudiés. 

L’ethnographie est ainsi une méthode d’enquête exigeante qui implique d’être engagé.e à titre personnel dans les activités et les relations qui se tissent dans milieu social exploré mais aussi de produire un savoir objectivé et objectivant tourné vers la discussion scientifique, l’administration de la preuve et la montée en généralité. 

La pratique de l’ethnographie est largement partagée et valorisée en sciences humaines et sociales.  Dans nombre de nos formations en sociologie, en science politique, en ethnologie et anthropologie, les étudiant.es sont amené.es à s’éprouver dans la réalisation d’enquêtes de terrain et la plupart des mémoires ou des travaux de recherche engagés dans la production et l’analyse de données qualitatives ont aujourd’hui recours à un « temps » ethnographique plus ou moins poussé, articulé ou non à d’autres méthodes de collectes de données, que celles-ci soient de facture quantitative, qualitative ou encore archivistique. 

La nécessaire proximité entretenue par le chercheur avec les personnes enquêtées a nourri une solide tradition réflexive dont les publications en sciences sociales se font très souvent l’écho. La prise en compte de la place de l’enquêteur.trice, de son rapport à l’objet, de la qualité des liens entretenus avec les enquêté.es et des position.s qu’il a pu occuper sur le « terrain », la mise en question des caractéristiques socio-genrées et ethnoraciales de l’enquêteur.trice et l’étude de la façon dont ces dernières peuvent travailler la collecte et l’analyse des données ethnographiques font aujourd’hui l’objet de questionnements réguliers en séminaires, soutenances et comité de thèse contribuant à questionner ce que faire de l’ethnographie veut dire : le temps de présence sur le « terrain », les modalités d’implication des chercheurs et la définition même de ce que l’on peut entendre par « terrain » alimentent des échanges nourris sur ce qui peut être attendu dans une « vraie » ethnographie.

Pourquoi une école Thématique CNRS en ethnographie ?

L’école thématique CNRS « Épistémologie et pratique de l’enquête ethnographique en SHS » est née d’une double aspiration :


  • contribuer à une formation dense et réflexive des ethnographes en SHS
  • fédérer plus largement un réseau d’ethnographes en France et à l’international. 

Les questions éthiques autour du consentement des enquêté·es, des politiques de protections des données individuelles, ou encore l’accroissement des financements sur projets impliquent de repenser les manières dont on peut s’insérer sur la longue durée dans un groupe, rendre raison des logiques des trajectoires de ses membres ou de leurs actions et généraliser nos résultats. 

Pour les nouveaux ethnographes comme pour les confirmés, se (re)posent des questions centrales : comment mener des enquêtes, de mener les enquêtes, de former les futures générations à cette pratique, qu’on défend exigeante et scientifique, en ce qu’elle apporte des connaissances et manières de théoriser le monde social inaccessibles autrement.

Cette école thématique propose donc un espace de formation spécifiquement dédié à la mise au jour et à la discussion du travail de l’ethnographe aujourd’hui, depuis la « fabrique » des données ethnographiques jusqu’aux enjeux de l’écriture, de la diffusion et de la valorisation des « résultats ». 

Il s’agit d’offrir un espace de réflexion sur la pratique et l’encadrement scientifique de l’enquête ethnographique en proposant des sessions tournées vers la sensibilisation aux les enjeux théoriques, épistémologiques et éthiques liés à cette méthode d’enquête en SHS.

L’école thématique entend plus généralement fédérer un pôle d’ethnographes en SHS en France pour offrir un cadre institutionnel aux nombreux échanges nationaux et internationaux de divers ordres (séminaires, colloques, doctoriales, publications, etc.) qui se sont multipliés ces dernières années autour de la pratique, de la diffusion et de la légitimation de l’ethnographie en sciences sociales. 

Pourquoi rejoindre la formation ?

  • Partager, éprouver et mettre à jour ses pratiques d’enquêtes sur le terrain. Acquérir de nouveaux savoirs faires et affuter son œil et son corps d’ethnographe
  • Réfléchir collectivement à la façon dont on peut former à la pratique de l’ethnographie aujourd’hui 
  • Faire partie d’un réseau d’ethnographes qui s’engage à mieux armer et à défendre la pratique ethnographique vis-à-vis des instances de financement et d‘évaluation de la recherche comme des comités d’éthique.
  • Avancer dans la rédaction d’un texte ethnographique ou dans la mobilisation analytique des écrits ethnographiques collectés dans le cadre de ses propres travaux. Deux ateliers d’écriture sont proposés durant la formation et permettront aux participant·es seront mis en petits groupes de quatre collègues au sein duquel ils/elles échangeront leurs textes quelques temps avant l’école. Pendant la semaine, chacun·e verra son texte discuté par les trois collègues de son groupe.